
Le 28 mars 2001, des perquisitions ont lieu au domicile des appelants Bordeleau, Lefebvre, Moreau et Mayrand, de même qu’à celui de coaccusés. Elles permettent la découverte de nombreux objets démontrant l’appartenance des appelants aux deux groupes visés par l’enquête soit les Hells Angels Nomads et les Rockers. Elles établissent également, en les analysant à la lumière de l’ensemble de la preuve, que ces deux groupes constituaient une seule et même organisation criminelle, dont l’activité principale était le trafic de cocaïne à grande échelle.
Richard Mayrand avait un rôle clé dans l’organisation dont il était l’une des têtes dirigeantes. On a saisi chez lui des comptes rendus de réunions des Hells Angels, 313 000 $ en billets de 20 $, regroupés en paquets de 10 000 $, tel que le faisaient les Nomads qui récupéraient l’argent de la drogue, ainsi qu’une carte de Montréal séparée en plusieurs territoires attribués aux Nomads et à d’autres groupes.
Sylvain Moreau était lui aussi d’accord avec la séparation des Rockers en deux clans, celui de l’Est et celui de l’Ouest. À au moins une reprise, lors d’une réunion, il a reproché aux autres membres leur manque d’empressement à faire le guet (la « watch ») pour le compte des Nomads. Il a été vu acquittant le 10 %. Selon Stéphane Sirois, Moreau s’approvisionnait en drogue auprès de lui pour ensuite vendre pour Daniel Lanthier, un membre des Rockers.
Éric Fournier a voté en faveur de la réintégration de certains individus au sein des Rockers, en insistant pour que les membres portent à l’avenir une arme lorsqu’ils sont en compagnie des Nomads.
Luc Bordeleau faisait partie, à titre de prospect Nomads, des têtes dirigeantes de l’organisation. Les Rockers ne pouvaient donc s’adonner au commerce de la drogue sans que Bordeleau le sache et sans que les Nomads les aient autorisés à ce faire.
Chacun des appelants est clairement relié à une organisation criminelle vouée essentiellement au trafic de drogues. Par conséquent, les verdicts de culpabilité relativement au chef de trafic de drogues, commis dans le cadre d'un complot, étaient raisonnables pour tous les appelants.
En ce qui concerne Fournier cependant, la conclusion doit être différente. Aucune preuve directement recevable contre lui ne le relie au complot pour meurtre. Comme mentionné précédemment, sa seule participation aux activités du gang ne saurait suffire lors de la deuxième étape, de sorte qu’il y a absence totale de preuve qu’il ait été membre du complot en vue de commettre des meurtres. Son acquittement s'impose donc quant à ce chef. Quant à Couture, les documents saisis en sa possession le 29 novembre 1997 constituent des éléments de preuve directement recevables contre lui, pouvant démontrer sa participation probable au complot pour meurtre.
Les appelants et leurs coaccusés ont été arrêtés, le 28 mars 2001, dans le cadre d’une vaste opération policière nommée « Printemps 2001 » et ont été reconnus coupables des trois infractions suivantes :
1) complot pour meurtre à l’endroit d’individus faisant le trafic d stupéfiants entre le 15 janvier 1995 et le 27 mars 2001;
2) trafic de substances prohibées entre le 14 mai 1997 et le 27 mars 2001; et
3) participation aux activités d’un gang, tout en sachant que certains de ses
membres commettent ou ont commis le trafic de substances prohibées au
profit ou sous la direction d’un gang ou en association avec lui.
Chacun des membres de l’organisation participait au trafic de drogues, soit de manière directe, soit de manière indirecte, en participant financièrement à l’effort commun. Il en était de même du complot en vue de commettre des meurtres : bien que tous ne commettaient pas directement de tels crimes, chacun connaissait l’existence de la guerre pour le contrôle du marché de la drogue et adhérait à l’objectif commun d’expansion. Ainsi, chacun, directement ou indirectement, en contribuant financièrement, en colligeant de l’information sur les ennemis ou, encore, en participant autrement aux activités du gang, aidait ou encourageait les auteurs véritables à commettre des meurtres, principalement de membres de groupes rivaux, afin de conserver ou d'agrandir leur territoire de vente. Les appelants sont d’avis que les verdicts de culpabilité portant sur les infractions de complot pour meurtre et de trafic de drogues ne sont pas supportés par la preuve et sont déraisonnables. Ils ne plaident toutefois pas cet argument à l’encontre du verdict prononcé sur le chef d’accusation de gangstérisme.
Cour supérieur
La Cour infirme le verdict de culpabilité.
Cour d´appel- Greffe de Montréal