L’extradition est le processus formel par lequel un État demande à l’État requis le retour d’une personne accusée ou reconnue coupable d’une infraction pour qu’elle soit jugée ou purge une peine dans l’État requérant. Historiquement, il n'y avait pas d'obligation générale d'extrader. L’extradition était souvent fondée sur des relations informelles entre les dirigeants d’États souverains. Le nombre croissant de ces affaires a créé le besoin d’accords plus formels.
L’article 16 de la Convention contre la criminalité organisée traite de l’extradition. Cet article a 17 paragraphes, ce qui en fait le deuxième article le plus long de la Convention, après l’article 18 surl’entraide judiciaire. Cela montre d’une part la complexité de la coopération internationale et, d’autre part, son importance dans le cadre de la lutte contre la criminalité transnationale organisée.
Dans le processus d'extradition, les défis sont similaires à ceux de l'entraide judiciaire. Les différents systèmes et cadres juridiques doivent être conciliés. Malgré les différences juridiques, il existe plusieurs principes en matière d’extradition qui sont communs à la plupart des pays. La Convention contre la criminalité organisée s’appuie sur ces principes pour créer un cadre global en matière d’extradition.
Les principes en matière d’extradition
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Le principe le plus courant est probablement celui de la double incrimination, selon lequel l’infraction présumée pour laquelle l’extradition est demandée doit être une infraction pénale tant dans l’État requérant que dans l’État requis.
Les tendances et les développements récents en matière de droit de l’extradition se sont concentrés sur l’assouplissement de l’application stricte de certains motifs de refus des demandes d’extradition. Des tentatives ont été faites pour atténuer, par exemple, les difficultés liées à la double incrimination en mettant l’accent sur la conduite sous-jacente de l’infraction en question, indépendamment de la dénomination de l’infraction ou de son « label juridique » dans les État requérants et requis.
En vertu du principe de spécialité, qui est codifié dans de nombreux traités bilatéraux d’extradition et régimes régionaux d’extradition, une personne extradée ne peut être poursuivie, condamnée, détenue, extradée à nouveau vers un État tiers ou être soumise à toute autre restriction de sa liberté individuelle dans le territoire de l'État requérant pour toute infraction commise avant sa remise autre que l'infraction pour laquelle l'extradition a été accordée ou toute autre infraction pour laquelle l'État requis donne son consentement. La spécialité sert de garantie contre les poursuites judiciaires engagées dans l'État requérant pour des infractions politiques et des violations d'autres règles de fond du droit de l'extradition, telles que la double incrimination et le principe de ne bis in idem.
Selon le principe de non-extradition des ressortissants, de nombreux États refusent toute obligation de remettre leurs propres citoyens. Dans certains pays, il existe même des dispositions constitutionnelles interdisant l'extradition des ressortissants du pays concerné. Néanmoins, malgré ce principe général, le droit international public dicte que les États ont l’obligation légale d’extrader ou de poursuivre (aut dedereaut judicare) les personnes qui commettent des infractions graves d’envergure internationale. Cette obligation repose sur la nature extraterritoriale des infractions d’envergure internationale et reflète une tentative de la communauté internationale de veiller à ce que les auteurs soient poursuivis soit par les autorités nationales de cet État, soit par un autre État qui indique qu’il est disposé à poursuivre les auteurs de l’infraction en demandant l’extradition.
Article 16. Extradition Un État Partie sur le territoire duquel se trouve l’auteur présumé de l’infraction, s’il n’extrade pas cette personne au titre d’une infraction à laquelle s’applique le présent article au seul motif qu’elle est l’un de ses ressortissants, est tenu, à la demande de l’État Partie requérant l’extradition, de soumettre l’affaire sans retard excessif à ses autorités compétentes aux fins de poursuites. Lesdites autorités prennent leur décision et mènent les poursuites de la même manière que pour toute autre infraction grave en vertu du droit interne de cet État Partie. Les États Parties intéressés coopèrent entre eux, notamment en matière de procédure et de preuve, afin d’assurer l’efficacité des poursuites. |
Parmi les autres principes figure la clause de non-discrimination qui dispose que les États requis n'ont aucune obligation d'extrader s'il y a des raisons de croire que la personne serait persécutée dans l'État requérant en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son origine ethnique, ou de ses opinions politiques.
Il convient d’ajouter que l’exceptiond’infraction politiquepour l’extradition est l’un des aspects les plus controversés du processus d’extradition. Si, en théorie, ce principe donne à l’État requis le droit de refuser l’extradition pour des infractions politiques, l’obligation pratique de ce principe est loin d’être réglée car il n’existe pas de définition universellement acceptée de l’« infraction politique ». Des développements récents suggèrent également que des tentatives sont faites pour restreindre le champ d’application de l'exception de l'infraction politique, voire l’abolir. L’augmentation du terrorisme international, par exemple, a conduit les États à se montrer disposés à limiter la portée de l’exception de l’infraction politique, qui ne s’applique généralement plus aux infractions contre le droit international.
L’État requis n’est pas tenu de remettre des personnes en cas de risque éventuel de torture et d’autres traitements inhumains ou dégradants dans l’État requérant ou lorsqu’il y a des raisons de croire que l’État requérant ne peut assurer un procès équitable ou assurer des garanties minimales dans le cadre d’une procédure pénale.
Il est également très probable que l’État requis ne livrera pas une personne qui a déjà été poursuivie en justice (indépendamment du résultat des poursuites judiciaires) par ses autorités en ce qui concerne l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée (« autorité de la chose jugée » ou « ne bis in idem »).
Jusqu’à présent, la plupart des accords d’extradition sont de nature bilatérale, mais de plus en plus d’accords multilatéraux sont signés et mis en œuvre au niveau régional ou international (la Convention contre la criminalité organisée est un exemple caractéristique d’instrument international de ce type). L’avantage des conventions multilatérales est qu’elles offrent des définitions communes des infractions et des procédures pour les États qui ont souvent des traditions et des procédures juridiques différentes (Nicholls, Montgomery, Knowles, Doobay et Summers, 2013 ; Missbach, 2015).
La Convention contre la criminalité organisée dispose que toute infraction comprise dans la Convention est « de plein droit incluse dans tout traité d’extradition en vigueur entre les États Parties en tant qu’infraction dont l’auteur peut être extradé ». En l’absence d’un traité et si un État insiste sur l’existence d’un traité d'extradition, une option est prévue pour que cet État utilise la Convention elle-même comme véhicule d'extradition (art. 16(3) de la Convention contre la criminalité organisée).
Le mandat d'arrêt européen (MAE) Le mandat d'arrêt européen (MAE), appliqué dans l'ensemble de l'UE, a remplacé les longues procédures d'extradition dans le territoire de l'UE. Il améliore et simplifie les procédures judiciaires visant à remettre des personnes dans le but de mener des poursuites pénales ou d'exécuter une peine ou une mesure de sûreté privatives de liberté. La simplification et l'amélioration de la procédure de remise entre les pays de l'UE ont été rendues possibles grâce à un niveau élevé de confiance mutuelle et de coopération entre les pays. Les conditions: un MAE peut être délivré par une autorité judiciaire nationale si :
La base juridique : le document de l'UE régissant le fonctionnement du MAE est la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002. Il s'agit du premier instrument à être adopté sur la base du principe de reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires. Il est entré en vigueur le 1er janvier 2004 et repose sur le principe des contacts directs entre les autorités judiciaires. La proportionnalité : il est nécessaire de veiller à ce que le MAE soit utilisé de manière proportionnée afin que le système ne soit pas miné par une surabondance de MAE pour des infractions mineures. Les autorités judiciaires des États membres de l'UE qui émettent le MAE doivent appliquer un « contrôle de proportionnalité » en tenant compte de la gravité de l'infraction, de la durée de la peine et des coûts et avantages de l'exécution d'un MAE. Garantir des procès équitables et les droits fondamentaux : le fonctionnement du MAE profitera également au travail de l'Union européenne qui contribue à garantir des procès équitables en établissant des normes communautaires minimales pour les droits des personnes soupçonnées ou accusées d'avoir commis une infraction. Cela comprend des mesures établissant des règles communes dans l'UE concernant :
Le processus du MAE introduit les nouveautés suivantes par rapport aux anciennes procédures d’extradition :
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Les outils d'assistance technique de l'ONUDC sur l'extradition L’ONUDC a élaboré un traité type d’extradition(1990) et une loi type sur l’extradition (2004). Ces outils d’assistance technique sont destinés à être utilisés par les États dans la négociation d’accords bilatéraux et régionaux pour promouvoir une coopération plus efficace dans les affaires pénales ayant des implications transnationales et pour la promulgation de lois nationales pertinentes. |
La procédure par laquelle un État demande l’extradition d’une personne depuis un autre État aux fins d’un procès pénal est une entreprise complexe et sérieuse. La présentation et l’exécution d’une demande d’extradition impliquent les systèmes juridiques de plusieurs États - un ensemble complexe de lois et de procédures destinées à protéger la souveraineté des États concernés et les droits de la personne recherchée. Par conséquent, une attention particulière aux règles et aux exigences procédurales est nécessaire pour garantir que les deux États font justice dans le cadre de leurs systèmes juridiques et à l’égard de la personne accusée.
En fonction de sa législation interne, un certain nombre de facteurs sont pris en compte par l’État requis qui reçoit une demande d’extradition. La décision d'extrader une personne vers un autre État est, dans la plupart des cas et à l'exception du processus du MAE, le résultat d'un système à deux niveaux impliquant le pouvoir judiciaire au début du processus et le pouvoir exécutif au point final de la prise de décision (si le pouvoir judiciaire a statué positivement sur l'octroi de la demande d'extradition). Selon le pays, les tribunaux prennent en compte un certain nombre de facteurs pour décider d’extrader ou non, notamment la double incrimination, l’identité, la suffisance des preuves à l’appui et l’existence d’un traité d’extradition. Dans certains pays, les décisions du tribunal ou de l'exécutif peuvent faire l'objet d'un appel ou d'un réexamen.
La procédure d’extradition est soumise à des délais stricts pour le dépôt de documents, les appels, la comparution du suspect devant le tribunal et la remise du suspect si elle est ordonnée.La peine de mort est un problème dans certaines demandes d’extradition. Les États qui ont aboli la peine de mort refusent l’extradition aux États où la peine de mort peut être imposée, sauf si des garanties sont données que la personne concernée ne sera pas condamnée à mort ou, si elle est condamnée à mort, que la peine ne sera pas exécutée. Ces dernières années, la plupart de ces affaires ont impliqué des personnes soupçonnées de terrorisme (Conseil économique et social des Nations Unies, 2010).
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