Pour lutter contre la criminalité organisée et, en particulier, son infiltration dans, et son influence corruptrice sur des activités légitimes, les États-Unis ont créé l’infraction de racket. La loi sur le racket est un nouveau type de loi qui a un objectif similaire à celles sur l’entente et l’association de malfaiteurs mais avec un champ d’application plus large. L’infraction de racket n’est pas prévue dans la Convention contre la criminalité organisée. Elle est sanctionnée par de lourdes peines pour punir les infractions commises dans le cadre d’une entreprise criminelle continue. Elle est parfois appelée RICO (acronyme de « Racketeer Influenced and Corrupt Organizations », c’est-à-dire « organisations corrompues sous l’influence de racketteurs »), et déclare illégale l’acquisition, l’exploitation ou la collecte de revenus tirés d’une entreprise au moyen d’une activité de racket.
Même si un nombre limité d’États membres disposent d’une législation semblable au RICO, plusieurs pays ont des lois ayant le même dessein, mais il s’agit de lois dont le champ d’application varie considérablement. L’Australie, le Canada, l’Italie, la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du Sud sont des exemples de pays avec de nouvelles lois visant les activités de racket, telles que les infractions financières, les transactions bancaires, la corruption, la cybercriminalité et d’autres formes d’infractions de nature transnationale. Un nombre important d’affaires touchant au racket impliquent la criminalité organisée transnationale utilisant Internet et les échanges internationaux pour fournir des biens et services illicites (Ayling et Broadhurst, 2014 ; Heber, 2009 ; Salvador, 2015 ; Sergi, 2014).
Définition d’une entreprise de racket
L’activité de racket peut être définie en termes généraux et plusieurs infractions graves suffisent pour engager la responsabilité si elles sont commises dans le cadre d’une entreprise et selon un schéma. Une entreprise au sens de RICO est définie comme toute entreprise continue ou groupe continu légal ou illégal qui sert de base à une activité criminelle. Une entreprise peut être tout individu ou groupe (organisation légale ou illégale) qui commet ces infractions. Le schéma correspond à deux infractions graves ou plus, commises sur une période de dix ans (à l’exclusion des périodes d’emprisonnement des suspects).
NB : Dans cette définition d’une entreprise de racket, « infraction grave » fait référence à « felony ». En droit américain, felony désigne une infraction punie d’au moins un an d’emprisonnement ou plus (Harrap’s Dictionnaire juridique français-anglais, 2004).
La loi sur les RICO prévoit de lourdes peines (jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle) pour les infractions de type « racket », c’est-à-dire des infractions particulières commises dans le cadre d’une entreprise criminelle ou suivant un schéma. Ces dispositions de la loi sur les RICO ont été mises en place pour lutter contre les groupes criminels organisés et leurs opérations.
La portée et le sens précis des expressions « entreprise » et « schéma » et les activités qui suffisent à établir l’existence d’une « activité de racket » ont été définis par le biais d’une série de décisions rendues et d’interprétations faites par les tribunaux nationaux, comme cela est souvent le cas dans les pays de common law. Les affaires de racket couvrent maintenant les pratiques abusives des entreprises, la corruption des agents publics et d’autres activités criminelles continues. C’est l’entreprise qui est au centre des activités de racket (Kleemans, 2017 ; State of New Jersey Commission of Investigation, 2011 ; Transcrime, 2012 ; U.S. Department of Justice, 2016).
Le schéma 2.1 illustre les différences entre les trois approches de l’incrimination de la criminalité organisée. L’entente se focalise sur la planification des actes délictueux, l’association de malfaiteurs se concentre sur les membres des groupes criminels, alors que le racket se focalise sur les activités criminelles continues.
Le racket est un instrument qui permet à la justice pénale de lutter contre les entreprises criminelles qui s’engagent dans des activités continues relevant de la criminalité organisée, plutôt que de poursuivre judiciairement des individus ou des groupes pour des actes illégaux spécifiques. Il a été constaté plus de 80 ans auparavant que « le racket ne peut exister sans protection » (Chamberlin, 1932). L’incrimination du racket a pour finalité de retirer une partie de la protection dont bénéficient les entreprises criminelles en exposant ceux qui sont impliqués à de lourdes peines, supérieures à celles prévues pour les infractions proprement dites.
En plus des infractions d’entente, d’association de malfaiteurs et de racket, la responsabilité doit être élargie aux personnes qui fournissent des conseils ou une assistance pour la commission d’infractions graves impliquant la criminalité organisée. Aux termes de la Convention contre la criminalité organisée, cette responsabilité englobe spécifiquement les personnes qui organisent, dirigent, facilitent, encouragent, favorisent ou conseillent intentionnellement, sur la commission d’une infraction grave impliquant un groupe criminel organisé. Ces dispositions permettent l’ouverture de poursuites judiciaires contre les dirigeants, les complices, les organisateurs et les arrangeurs ainsi que contre les participants de bas niveau, pour la commission d’infractions graves. Les termes « facilite, encourage ou favorise au moyen d’une aide ou de conseils » couvrent également les parties secondaires et les complices qui ne sont pas eux-mêmes les principaux délinquants.