Comme le souligne le Module 5, les personnes sont généralement incitées à migrer de façon irrégulière en raison des conditions difficiles et instables de leurs pays d’origine. Les perceptions erronées des causes de la migration irrégulière peuvent aboutir à l’octroi d’une assistance inférieure aux normes et ceci met non seulement en péril les droits des migrants mais aussi dans certains cas le succès de l’enquête et de la poursuite des auteurs du trafic illicite de migrants. Les migrants faisant l’objet d’un trafic illicite peuvent aussi être des demandeurs d’asile, des réfugiés, des apatrides et des victimes de la criminalité, notamment des victimes de la traite des personnes. Il est essentiel d’identifier avec précision les nécessités spécifiques de protection des migrants afin de s’assurer qu’ils reçoivent une assistance appropriée. Ceci requiert non seulement des mesures législatives adéquates mais également une formation adéquate de professionnels, des processus solides d’identification, des procédures consolidées de renvoi et des mécanismes de suivi, afin de s’assurer que ces processus et ces procédures sont mis en œuvre en conformité avec les meilleures pratiques. Lors des procédures d’identification il est extrêmement important de porter une attention particulière aux personnes qui ont des nécessités spéciales, liées par exemple à leur âge ou leur genre. Ces efforts le respect et l’application du cadre international des droits de l’Homme, comme expliqué précédemment.
Comme l’indique le Module 1, il y a eu une tendance à promouvoir l’interception des groupes de trafic illicite de migrants avant leur arrivée dans l’état de destination envisagé, et cela a parfois été appelé l’externalisation des frontières ”. En général, l’article 11(1) du Protocole relatif au trafic illicite de migrants souligne que les contrôles aux frontières visant à prévenir et à détecter le trafic illicite de migrants doivent s’effectuer “sans préjudice des engagements internationaux relatifs à la libre circulation des personnes”. L’Article 19(1) stipule que les mesures de contrôles aux frontières doivent tenir compte des obligations internationales imposées à l’état partie concerné, y compris celles de la Convention de 1951 sur le statut des réfugiés et son protocole de 1967, et le paragraphe 2 prévoit le respect du principe de non-discrimination lors de la mise en œuvre du Protocole relatif au trafic illicite des migrants.
Dans ce contexte, les procédures d’entrée et de sortie ne doivent pas être discriminatoires pour des motifs de race, de religion, de sexe ou de handicap. Le HCR préconise l’utilisation des systèmes d’entrée soucieux de protection. Ce sont des systèmes qui tiennent compte des nécessités de protection et du devoir des états de respecter leurs obligations conformément au droit relatif aux droits de l’Homme et aux réfugiés, et cela inclut le principe de non-refoulement. Les systèmes d’entrée soucieux de protection garantissant que les mesures légitimes de contrôle ne soient pas appliquées de manière arbitraire et permettent aux demandeurs d’asile, et à d’autres groupes ayant des nécessités spécifiques de protection d’’être identifiés afin de leur permettre l’accès à un territoire où leurs besoins pourront être évalués et traités de manière appropriée. Les personnes qui effectuent les contrôles aux frontières et les procédures d’identification devraient donc tenir compte des droits de l’Homme et des obligations humanitaires, principalement parce qu’ils sont probablement les premiers fonctionnaires publics que rencontrent les migrants faisant l’objet d’un trafic illicite. Dans ce contexte les droits importants incluent le droit des personnes à abandonner n’importe quel pays, y compris le leur, et le droit des personnes à demander l’asile et tous autres types de protection internationale. Les demandes de protection doivent être évaluées au cas par cas, d’où l’importance des procédures d’aiguillage et d’identification efficaces et simplifiées.
Le fait que les cas des migrants faisant l’objet d’un trafic illicite peuvent facilement devenir des cas de trafic illicite de personnes souligne l’importance de procédures d’identification efficaces. Les agents de première ligne ou les agents des frontières n’ont pas forcément la capacité de faire immédiatement la distinction entre les diverses catégories de migrants faisant l’objet d’un trafic illicite (par exemple entre les demandeurs d’asile et les victimes de trafic). Ils devront donc les référer aux autorités compétentes qui ont la capacité d’effectuer les identifications rapidement et efficacement. A cet effet, il est essentiel de développer de solides directives, des mesures de formation et des procédures opérationnelles normalisées, complétées par de solides arrangements institutionnels qui garantissent une coordination et une coopération efficaces entre tous les intervenants.
Si les droits de l’Homme des personnes appelés des ‘clandestins’ ne sont pas reconnus, il en résulte que les droits de certaines personnes non identifiées victimes de trafic ne le sont pas non plus. Nous ne pouvons pas ignorer les mesures contre le trafic qui affectent les personnes avec qui nous travaillons. L’Alliance mondiale contre la traite des femmes (GAATW), Les droits de l’Homme dans la traite des migrants (2011) |
Lacunes en matière de protection: l’identification des migrants en situation vulnérableHormis les migrants connaissant un État de santé grave, l’assistance immédiate, les références et l’attention médicale spécialisée sont accordés à très peu de migrants. Le processus d’identification était largement basé sur les vulnérabilités visiblement identifiables, par exemple les femmes manifestement enceintes et les personnes avec des handicaps manifestes pouvaient avoir accès au soutien nécessaire, alors que ce n’était souvent pas le cas pour les femmes qui se trouvaient dans les premières étapes de leur grossesse, les personnes avec des incapacités psychosociales et les personnes ayant survécu à des traumatismes ou des violences à caractère sexuel ou sexiste et qui ne n’avaient pas de cicatrices visibles ou qui hésitaient à s’identifier. De nombreuses personnes ont signalé que souvent les questions des autorités ont pour seul objectif d’établir une éventuelle demande d’asile, et dans certains pays ceci est effectué dans la précipitation et peu d’informations significatives sont fournies aux migrants. De plus, les équipes ont observé que les procédures d’identification n’étaient pas effectuées de manière cohérente dans tous les pays ou toutes les installations, et qu’il y avait un manque de procédures établies et /ou d’orientations sur les normes applicables. Les équipes estiment donc que les mécanismes visant à identifier les migrants en situation vulnérable sont nettement inadéquats. La pénurie de personnel qualifié habilité à évaluer et déterminer la vulnérabilité et à répondre de manière appropriée aux besoins de protection était un obstacle additionnel pour déterminer les vulnérabilités de manière adéquate. Les équipes ont constaté que dans de nombreux cas le nombre insuffisant de personnel qualifié a entraîné un manque de soins de santé physique et mentale adéquats, d’assistance et d’accompagnement psychosocial et de services accessibles de santé sexuelle et reproductive (par exemple les services de contraception d’urgence et d’avortement, les soins de santé maternelle). HCDH, à la recherche de la dignité – Rapport sur les droits de l’Homme des migrants aux frontières européennes (2017) |