La contrefaçon de documents d’identité, de CD, de DVD, de logiciels, de médicaments, d’armes, de produits alimentaires, de vêtements et de cigarettes s’est considérablement développée ces dernières années, en grande partie en raison des progrès technologiques et de la facilité de circulation de ces produits autour du monde. L’implication de groupes criminels organisés dans la production et la distribution de produits contrefaits est bien documentée. Ces groupes criminels organisés opèrent par-delà les frontières nationales dans des activités qui incluent la fabrication, l’exportation, l’importation et la distribution de produits illicites. Les autorités internationales, régionales et nationales ont découvert des liens complexes entre cette forme de criminalité et d’autres infractions graves comme celles traitées dans d’autres sections du présent module.
Contrefaçon et autres infractions graves
En juin 2010, la police italienne a arrêté 17 ressortissants chinois et 7 ressortissants italiens dans une enquête sur différentes activités criminelles, notamment le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, la traite des personnes et la distribution de produits de contrefaçon. Les produits contrefaits étaient essentiellement des vêtements de créateurs fabriqués par des groupes criminels chinois en Toscane. Cette enquête a conduit à la saisie de 780 000 articles contrefaits (ONUDC (b), 2013).
La falsification est la fabrication de faux documents ou l’altération de documents existants. Falsification est un terme générique englobant techniquement la contrefaçon. Toutefois, ces termes sont souvent employés de manière interchangeable pour décrire des documents ou des produits falsifié ou faux de toute sorte, et leur usage varie selon les pays. A l’origine, la contrefaçon désignait spécifiquement la falsification de monnaie, mais son usage s’est étendu à tous les types de faux, qui comprennent la fabrication ou le commerce d’un document ou d’un produit sans la permission du propriétaire légal du brevet, de la marque déposée, du droit d’auteur ou de la licence.
La corruption et les pots-de-vin sont intrinsèquement liés au trafic illicite de produits de contrefaçon, en particulier lorsque ceux-ci sont expédiés à l’étranger. Le trafic de produits de contrefaçon offre aussi aux criminels une source complémentaire de revenus et un outil de blanchiment des produits dérivés de différentes infractions. De même, les produits d’autres infractions ont été utilisés par des groupes criminels organisés pour financer leurs activités de contrefaçon (UNICRI/ICC BASCAP, 2013).
Le commerce de contrefaçon est une opération mondiale répartie dans de nombreux pays et organisée par des réseaux criminels transfrontaliers. La mise en œuvre de la Convention sur la criminalité organisée représente donc une première étape importante pour la création d’un cadre juridique solide contre le trafic de produits de contrefaçon. En plus d’exhorter les États parties à établir des mécanismes tels que, entre autres, la coopération en matière de détection et de répression et l’entraide judiciaire, dans le cadre de la Convention, les États pourraient décider d’adopter des lois plus strictes afin de lutter contre le trafic de produits de contrefaçon, en particulier dans le cas de menaces pour la santé et la sécurité publiques.
La contrefaçon est un commerce très lucratif qui profite de consommateurs non informés et de l’appétit des individus pour les marques à prix réduit ou qui exploite simplement leur situation financière. Bien qu’il soit difficile de la mesurer avec certitude, la valeur de la contrefaçon a été estimée par l’OCDE à environ 250 milliards de dollars par an (OCDE & EUIPO, 2016).
Ces dernières années, la contrefaçon s’est étendue rapidement à des produits de tous types, y compris les DVD, les montres, le matériel électronique, les logiciels, les produits pharmaceutiques, les produits alimentaires et le tabac. En outre, à mesure que les ventes licites en ligne augmentent, les possibilités de ventes numériques de produits contrefaits se multiplient. Le phénomène du trafic en ligne de produits de contrefaçon est associé au défi supplémentaire de piraterie numérique de films, de jeux, de musique et d’autres produits numériques.
L’application de lois contre la contrefaçon est devenue plus difficile avec l’élargissement de l’accès aux technologies et la plus grande facilité de vente transnationale de produits et de services (Albanese, 2009 ; Fenoff et Spink, 2014). Outre les défis liés à l’identification et au traçage des produits contrefaits et de leurs producteurs, la contrefaçon présente un défi supplémentaire dû au fait qu’elle est souvent perçue comme une « infraction mineure ». L’achat d’un sac à main contrefait, par exemple, pourrait ne pas être considéré par le consommateur comme une transaction illégale – simplement un moyen moins onéreux de porter des articles à la dernière mode. Néanmoins, on se préoccupe souvent peu de la manière dont l’argent dépensé dans les produits contrefaits peut en fin de compte se retrouver entre les mains de groupes criminels organisés ou de la manière dont les industries qui comptent sur des ventes légitimes en souffre.
Les préjudices résultant de la contrefaçon affectent tout le monde. Premièrement, les produits contrefaits tels que les produits pharmaceutiques, les aliments, les jouets ou les pièces automobiles peuvent représenter une grave menace pour la santé des consommateurs. Deuxièmement, la contrefaçon compromet l’emploi, puisque les produits sont copiés et produits illégalement et elle a un impact considérable sur les droits des travailleurs autour du monde. L’absence de contrôle des conditions de travail et de respect des droits en matière d’emploi placent les travailleurs qui produisent des produits de contrefaçon dans une position de très grande vulnérabilité. Ils sont souvent sous-payés, ne bénéficient d’aucune indemnité et n’ont droit à aucune forme de protection. Ces graves abus liés au travail surviennent souvent conjointement avec des menaces de violence, l’exposition à des matériels/matériaux dangereux et à des conditions de travail mortelles.
Troisièmement, les produits contrefaits représentent un énorme fardeau pour l’économie. Ils créent un commerce clandestin qui prive les gouvernements dans le monde entier de recettes pour les services publics cruciaux, imposant donc un plus lourd fardeau sur les contribuables. Enfin, la contrefaçon a également un impact considérable sur l’environnement puisque la production de produits contrefaits ne suit pas la réglementation en la matière. Les produits chimiques rejetés illégalement et la pollution atmosphérique non règlementée ne sont que quelques-unes des façons par lesquelles la contrefaçon contribue aux atteintes à l’environnement (Bate, 2008 ; Hetzer, 2002 ; McEwen et Straus, 2009 ; OMS, 2010).
Les réponses de justice pénale à cette forme de criminalité, bien que fondamentales, ne peuvent pas survenir dans le vide. Il est également grandement nécessaire de sensibiliser davantage à l’ampleur du problème et à ses répercussions pour la société. Par exemple, les organisations internationales, les autorités chargées de la santé publique et les organisations de consommateurs pourraient profiter des campagnes de sensibilisation des consommateurs pour informer les acheteurs sur les risques associés aux produits de contrefaçon, leur permettant ainsi de prendre des décisions plus éclairées.