Les principaux instruments juridiques internationaux visant à lutter contre le trafic illicite de migrants sont la CTOC et le Protocole contre le trafic illicite de migrants. En septembre 2018 (État de la ratification), la CTOC comptait 189 États parties et le Protocole contre le trafic illicite de migrants 146 États parties. L'objectif de la CTOC, en vertu de son article premier, est de "promouvoir la coopération [internationale] pour prévenir et combattre plus efficacement la criminalité transnationale organisée". Les Protocoles additionnels incriminent des actes autres que ceux visés par la CTOC et établissent des dispositions particulières applicables auxdits types de criminalité.
L'article 37 de la CTOC et l'article premier du Protocole contre le trafic illicite de migrants expliquent la relation entre ces instruments juridiques.
Article 37 CTOC
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Article 1 Protocole contre le trafic illicite de migrants
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L'objectif primordial de la CTOC et de ses protocoles est de lutter efficacement contre la criminalité transnationale organisée, notamment en renforçant la coopération internationale. En conséquence, la CTOC se concentre sur des activités qui sont très rentables pour les groupes criminels organisés. Néanmoins, les crimes établis conformément à la CTOC et à ses Protocoles restent punissables s'ils sont commis sans la participation d'un groupe criminel organisé.
Article 34 (2) CTOC(…) Les infractions établies conformément aux articles 5, 6, 8 et 23 de la présente Convention sont établies dans le droit interne de chaque État Partie indépendamment de leur nature transnationale ou de l’implication d’un groupe criminel organisé comme énoncé au paragraphe 1 de l’article 3 de la présente Convention, sauf dans la mesure où, conformément à l’article 5 de la présente Convention, serait requise l’implication d’un groupe criminel organisé. (…) |
Article 4 Protocole contre le trafic illicite de migrantsLe présent Protocole s’applique, sauf disposition contraire, à la prévention, aux enquêtes et aux poursuites concernant les infractions établies conformément à son article 6, lorsque ces infractions sont de nature transnationale et qu’un groupe criminel organisé y est impliqué, ainsi qu’à la protection des droits des personnes qui ont été l’objet de telles infractions. |
Dans le cas du trafic illicite de migrants, les infractions nationales devraient s'appliquer même lorsque la transnationalité et l'implication de groupes criminels organisés n'existent pas ou ne peuvent être prouvées. Guide législatif pour l'application de la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et des protocoles s'y rapportant Troisième Partie, chap. I, para. 20, p. 334. |
Selon l'article 2 de la CTOC, un groupe criminel organisé est :
Article 2 (c) CTOC“groupe structuré” désigne un groupe qui ne s’est pas constitué au hasard pour commettre immédiatement une infraction et qui n’a pas nécessairement de rôles formellement définis pour ses membres, de continuité dans sa composition ou de structure élaborée. |
Il ressort de cette définition que, par exemple, un pêcheur qui transporte des migrants pour faciliter leur entrée illégale dans un autre pays ou deux passeurs qui guident des personnes dans le désert pour les aider à traverser une frontière terrestre, s'ils sont seuls, sans lien avec une opération plus vaste, ne constituent pas un groupe criminel organisé.
Il convient de noter que la jurisprudence nationale s'est penchée sur la définition telle qu'elle est comprise dans certains cadres juridiques nationaux et a fourni plusieurs indicateurs concernant la participation d'un groupe criminel organisé à une entreprise de trafic illicite tel que les indicateurs énumérés dans le cas italien connu comme Glauco I (voir encadré 7).
Cas n. 10341/15 R.N. G.I.P. - Glauco IUn groupe criminel organisé se caractérise par les éléments suivants : "(i) un lien entre les membres de caractère (en principe) permanent ou, au moins, stable et visant à se poursuivre au-delà de la commission d'actes ou d'aventures criminels spécifiques ; (ii) la nature indéterminée du programme criminel ; et (iii) l'existence d'un certain niveau d'organisation qui, bien que minimal, est adéquat pour poursuivre les objectifs criminels établis. Conformément à la jurisprudence générale, il n'est pas nécessaire de conclure des accords formels. La condition de la non-détermination du programme criminel fait référence au nombre, aux modalités et aux objectifs de la conduite criminelle spécifique envisagée. Les indices utilisés pour démontrer l' [implication] d'un groupe criminel organisé, agissant sur la base d'un plan bien structuré, dédié au trafic illicite de migrants afin d'obtenir un avantage financier ou matériel[comprennent] : (i) concentration des migrants dans des endroits cachés dans le [pays de] départ, (ii) disponibilité de plusieurs moyens de transport différents pour effectuer les diverses phases du voyage, (iii) engagement de plusieurs hommes avec des rôles spécifiques (par ex. recruteurs, chauffeurs, équipages de navires, propriétaires) se conformant à des codes de conduite rigoureux, (iv) l'exposition systématique de la vie et de la sécurité des migrants à des risques graves compte tenu des conditions du voyage, (v) des moyens de communication diversifiés et sophistiqués, (vi) des tentatives de dissipation des traces et de tromperie des autorités, (vii) une méthodologie structurée concernant les paiements ; (viii) la disponibilité d'un réseau solide permettant les transits et séjours illicites (par ex logement, vêtements, transport à l'étranger, passeports frauduleux), (ix) le caractère régulier des activités, qui amène les suspects et leurs associés à parler souvent de " travail ". SHERLOC Base de données sur la jurisprudence du trafic illicite de migrants - Italie |